La situation des années 1930 à
1938
Depuis les Lumières allemandes, les relations entre
Allemands chrétiens et Allemands juifs s'étaient consolidées, et les juifs
allemands étaient intégrés dans la société allemande. La montée de
l'antisémitisme, la prise du pouvoir par le parti nazi en 1933, l'action de
boycott des magasins juifs le 1er avril 1933, ainsi que l'exclusion
croissante des juifs de la société et les diffamations dont ils étaient
victimes furent un choc pour les 500 000 juifs allemands. Beaucoup de juifs
allemands réalisèrent alors pour la première fois de leur vie qu'ils étaient
juifs, et les actions des nazis engendrèrent chez eux une nouvelle conscience
de soi
Le génocide dans la nuit du 9 au 10 novembre 1938, appelé
également la "Nuit de Cristal", mit définitivement fin à l'espoir
que la persécution des juifs en Allemagne se terminerait un jour, et fit
prendre conscience à beaucoup de juifs allemands du danger auquel étaient
exposées leurs vies. Dans toute l'Allemagne, des synagogues furent brûlées et
détruites, environ 7 500 magasins juifs furent saccagés, 90 juifs perdirent
leur vie cette nuit-là, et au moins 26 000 juifs furent arrêtés et internés
dans les camps de concentration de Dachau, de Sachsenhausen et de Buchenwald,
où des centaines de personnes furent assassinées les jours suivants. Beaucoup
de juifs, et surtout ceux appartenant au mouvement sioniste, se préparèrent
alors à l'émigration en apprenant un nouveau métier et en prenant des cours de
langue. Des centaines de juifs
allemands rejoignirent les Brigades internationales, et plusieurs milliers d'exilés juifs allemands combattirent
le régime hitlérien au sein des armées alliées et des mouvements de résistance
des pays dans lesquels ils résidaient. Mais 150 000 des 500 000 juifs allemands
ne purent fuir à l'étranger.
La Grande-Bretagne ne laissa immigrer dans son protectorat,
la Palestine, que 50 000 juifs allemands. Ceux qui restèrent en Allemagne essayèrent
de sauver leur peau en prenant activement part au travail des institutions
juives restantes, et s'entraidèrent afin de limiter la détresse des personnes
persécutées et menacées de déportation.
Certains se dressèrent contre l'injustice quotidienne et contre les crimes nazis, d'autres essayèrent de survivre à la persécution en se cachant. Les organisations culturelles et caritatives juives qui se mirent en place essayèrent de limiter l'exclusion des juifs de la vie sociale et de remédier au dénuement financier croissant de la population juive exclue de l'économie.
La Fédération des juifs d'Allemagne œuvrait sous la direction de Leo Back pour la sécurisation sociale des juifs allemands, et organisa la coopération entre les différentes institutions juives pour permettre l'assistance économique et morale des persécutés. Le refus de la communauté juive de se résigner se manifesta surtout dans le domaine des activités culturelles, dont furent exclus les "non-aryens" dans la société allemande. Des associations de musique, de théâtre, d'Art et de sport renforcèrent leurs activités, et lors de l'exclusion progressive des juifs de l'éducation, un système d'éducation juif fut mis en place.
Le chef d'orchestre et réalisateur Kurt Singer créa en 1933 la "Fédération culturelle des juifs allemands" pour permettre aux artistes juifs de continuer à exercer leur métier, et pour œuvrer contre l'exclusion des juifs de la vie culturelle en Allemagne. Mais en 1935, les autorités nazies contraignirent la scène culturelle juive à fonder la "Fédération du Reich des associations culturelles juives" ("Reichsverband der jüdischen Kulturbünde") et placèrent son travail sous le contrôle direct de la Gestapo. Au moyen de cette mesure et de l'interdiction qui fut faite aux "aryens" d'assister aux représentations culturelles juives, la Gestapo transforma la fédération en un instrument de mise à l'écart de la population juive, isolée ainsi dans un ghetto culturel et intellectuel. Kurt Singer fut arrêté en Hollande en 1940 et déporté à Theresienstadt, où il mourut en février 1944.
Le groupe sioniste clandestin "Chug Chaluzi" ("Cercle de pionniers") se forma au printemps 1943 autour de Jizchak Schwersenz et d'Edith Wolff. Ses 40 membres, provenant pour la plupart des mouvements de jeunesse sionistes, refusèrent de se résigner. Ils apportèrent leur aide aux déportés dans les camps de concentration à l'Est et essayèrent de fuir à l'étranger. Edith Wolff, considérée par les nazis comme "métisse de 1er degré", reçut une éducation protestante, mais elle se déclara juive par protestation contre la politique raciale nazie et devint pacifiste et sioniste. Elle permit à plusieurs persécutés de fuir, avait beaucoup de contacts avec des juifs qui se cachaient, et leur procura des cartes de rationnement. Lorsqu'en 1941 commença la déportation massive de juifs à Berlin, le groupe parvint à trouver des cachettes à quelques personnes menacées, et fabriqua également des faux-papiers, ce qui sauva la vie à Jizchak Schwersenz lors d'une razzia de la Gestapo. Celui-ci put fuir en 1944 en Suisse, puis à Haïfa. Edith Wolff fut arrêtée en 1944 par la Gestapo pour avoir procuré des cartes de rationnement à des juifs ; elle put couvrir ses contacts avec des juifs cachés et fut condamnée à une lourde peine de prison. Elle put survivre au régime nazi.
"Communauté pour la paix et le renouveau"
Werner Scharff fut l'initiateur de la "Communauté pour la paix et le renouveau" ("Gemeinschaft für Frieden und Aufbau"), une association d'aide aux persécutés, à laquelle adhéraient une vingtaine de personnes juives et chrétiennes. Werner Scharff était juif et fut déporté en août 1943 au ghetto de Theresienstadt ; il parvint à fuir un mois plus tard et retourna à Berlin, où il vécut dans la clandestinité. Il procura à des juifs, grâce à son grand réseau de relations, des faux-papiers et de l'argent, et leur trouva des cachettes. Il écrivit également des tracts pour la "Communauté pour la paix et le renouveau", qui voulait informer la population allemande du véritable caractère du régime nazi, inciter les soldats à déposer les armes, et qui appelait à la résistance contre le nazisme. Ces tracts furent déposés dans des boîtes aux lettres à Berlin et expédiés à des centaines de personnes ; certains purent même être acheminés clandestinement aux Pays-Bas et en France. En octobre 1944, la Gestapo démantela ce réseau et arrêta Werner Scharff, qui fut assassiné le 16 mars 1945 dans le camp de concentration de Sachsenhausen, quelques semaines avant la libération du camp. Eugen Herman-Friede, un adolescent juif qui avait été caché et protégé par Hans Winkler et qui avait pris part aux activités de la "Communauté pour la paix et le renouveau", fut arrêté le 11 décembre 1944 mais parvint à survivre à sa détention. La plupart des membres de ce groupe de résistance purent survivre grâce à la confusion qui régnait en Allemagne lors des derniers mois de la guerre.
Certains se dressèrent contre l'injustice quotidienne et contre les crimes nazis, d'autres essayèrent de survivre à la persécution en se cachant. Les organisations culturelles et caritatives juives qui se mirent en place essayèrent de limiter l'exclusion des juifs de la vie sociale et de remédier au dénuement financier croissant de la population juive exclue de l'économie.
La Fédération des juifs d'Allemagne œuvrait sous la direction de Leo Back pour la sécurisation sociale des juifs allemands, et organisa la coopération entre les différentes institutions juives pour permettre l'assistance économique et morale des persécutés. Le refus de la communauté juive de se résigner se manifesta surtout dans le domaine des activités culturelles, dont furent exclus les "non-aryens" dans la société allemande. Des associations de musique, de théâtre, d'Art et de sport renforcèrent leurs activités, et lors de l'exclusion progressive des juifs de l'éducation, un système d'éducation juif fut mis en place.
Le chef d'orchestre et réalisateur Kurt Singer créa en 1933 la "Fédération culturelle des juifs allemands" pour permettre aux artistes juifs de continuer à exercer leur métier, et pour œuvrer contre l'exclusion des juifs de la vie culturelle en Allemagne. Mais en 1935, les autorités nazies contraignirent la scène culturelle juive à fonder la "Fédération du Reich des associations culturelles juives" ("Reichsverband der jüdischen Kulturbünde") et placèrent son travail sous le contrôle direct de la Gestapo. Au moyen de cette mesure et de l'interdiction qui fut faite aux "aryens" d'assister aux représentations culturelles juives, la Gestapo transforma la fédération en un instrument de mise à l'écart de la population juive, isolée ainsi dans un ghetto culturel et intellectuel. Kurt Singer fut arrêté en Hollande en 1940 et déporté à Theresienstadt, où il mourut en février 1944.
Le groupe sioniste clandestin "Chug Chaluzi" ("Cercle de pionniers") se forma au printemps 1943 autour de Jizchak Schwersenz et d'Edith Wolff. Ses 40 membres, provenant pour la plupart des mouvements de jeunesse sionistes, refusèrent de se résigner. Ils apportèrent leur aide aux déportés dans les camps de concentration à l'Est et essayèrent de fuir à l'étranger. Edith Wolff, considérée par les nazis comme "métisse de 1er degré", reçut une éducation protestante, mais elle se déclara juive par protestation contre la politique raciale nazie et devint pacifiste et sioniste. Elle permit à plusieurs persécutés de fuir, avait beaucoup de contacts avec des juifs qui se cachaient, et leur procura des cartes de rationnement. Lorsqu'en 1941 commença la déportation massive de juifs à Berlin, le groupe parvint à trouver des cachettes à quelques personnes menacées, et fabriqua également des faux-papiers, ce qui sauva la vie à Jizchak Schwersenz lors d'une razzia de la Gestapo. Celui-ci put fuir en 1944 en Suisse, puis à Haïfa. Edith Wolff fut arrêtée en 1944 par la Gestapo pour avoir procuré des cartes de rationnement à des juifs ; elle put couvrir ses contacts avec des juifs cachés et fut condamnée à une lourde peine de prison. Elle put survivre au régime nazi.
"Communauté pour la paix et le renouveau"
Werner Scharff fut l'initiateur de la "Communauté pour la paix et le renouveau" ("Gemeinschaft für Frieden und Aufbau"), une association d'aide aux persécutés, à laquelle adhéraient une vingtaine de personnes juives et chrétiennes. Werner Scharff était juif et fut déporté en août 1943 au ghetto de Theresienstadt ; il parvint à fuir un mois plus tard et retourna à Berlin, où il vécut dans la clandestinité. Il procura à des juifs, grâce à son grand réseau de relations, des faux-papiers et de l'argent, et leur trouva des cachettes. Il écrivit également des tracts pour la "Communauté pour la paix et le renouveau", qui voulait informer la population allemande du véritable caractère du régime nazi, inciter les soldats à déposer les armes, et qui appelait à la résistance contre le nazisme. Ces tracts furent déposés dans des boîtes aux lettres à Berlin et expédiés à des centaines de personnes ; certains purent même être acheminés clandestinement aux Pays-Bas et en France. En octobre 1944, la Gestapo démantela ce réseau et arrêta Werner Scharff, qui fut assassiné le 16 mars 1945 dans le camp de concentration de Sachsenhausen, quelques semaines avant la libération du camp. Eugen Herman-Friede, un adolescent juif qui avait été caché et protégé par Hans Winkler et qui avait pris part aux activités de la "Communauté pour la paix et le renouveau", fut arrêté le 11 décembre 1944 mais parvint à survivre à sa détention. La plupart des membres de ce groupe de résistance purent survivre grâce à la confusion qui régnait en Allemagne lors des derniers mois de la guerre.
Romano
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