samedi 9 novembre 2013

"Mon Dieu, prend pitié du pécheur que je suis"


"Mon Dieu, prend pitié du pécheur que je suis"

Evangile Luc 18, 9-14, Sermon

 

Il est probable qu’aucun de nous ne se reconnaîtrait totalement dans le personnage du pharisien pas plus d’ailleurs que dans celui du publicain. Je crois qu’aucun de nous ne se croit juste, ne se vante de ses mérites (encore que !), ou de la qualité de sa vie spirituelle, personne ne méprise celui qui n’est pas comme nous, ne vit pas comme nous, ne pense pas comme nous (encore que !). Alors, à quelle conversion Jésus nous invite aujourd’hui?

 

Il me semble que l’interrogation que nous pose la parabole de Jésus est : quelle est la vérité de mon attitude devant Dieu ? Il est normal et bon de reconnaître ce nous pouvons faire de bien ; toutefois Jésus nous demande de ne pas nous en attribuer la gloire. Comme le dit l’apôtre Paul aux chrétiens de Corinthe : «Qu’as-tu que tu n’aies reçu ? Et si tu l’as reçu, pourquoi t’enorgueillir comme si tu ne l’avais pas reçu» 1 Co 4, 7. La vérité de mon attitude devant Dieu consiste à reconnaître ce que je peux faire de bien mais pour en rendre grâce car, si cela exige de ma part un effort personnel, je sais que sans le secours de l’Esprit Sait, je ne peux pas faire grand chose : «Sans moi, dit Jésus et donc sans mon Esprit, vous ne pouvez rien faire» Jean 15, 5.

 

De même nous ne nous sentons pas complètement comme le publicain. Seigneur, bien sûr, je sais que je suis un homme pécheur, mais je ne suis pas que cela, j’essaie un peu  d’être fidèle à ton évangile. La vérité de mon attitude consisterait à reconnaitre tout simplement ma pauvreté intérieure. Reconnaître que j’ai besoin d’un autre, du Christ. Certes, il y a du bien en moi mais aussi beaucoup de fragilités et de manques. La quête de Dieu, la poursuite de mon accomplissement personnel, le désir de sainteté ne peuvent pas se réaliser sans le secours de celui qui nous aime comme ses enfants.

 

Il n’y a aucune humiliation à reconnaître la main qui nous est sans cesse tendue. On peut alors se reconnaître dans le publicain de l’évangile : il publicain était vrai devant Dieu comme était vraie l’attitude de ce brigand attaché à une croix à côté de Jésus et la vérité de son attitude lui a value d’être «justifié», accueilli avec le Christ.

 

Ces attitudes de vérité sans orgueil comme sans misérabilisme c’est-à-dire ces attitudes de pauvres font que nous repartons «justifiés». Qu’est-ce que cela veut dire ? Être justifié, être juste c’est être accordé à Dieu. Nous avons en français le mot «ajusté» utilisé pour signifier que deux pièces de bois ou de métal sont parfaitement jointes jusqu’à ne faire plus qu’un, au point qu’on ne peut pas discerner de séparation. C’est une très belle image de ce qu’est «être juste» ou «être justifié» devant Dieu. Justifiés, nous sommes tellement accordés au Christ que nous ne faisons plus qu’un avec lui. Nous réalisons la prière de Jésus telle que Saint Jean nous la rapporte au chapitre 17 de son évangile : «Que tous, ils soient un, comme toi, Père, tu es en moi, et moi en toi. Qu'ils soient un en nous, eux aussi, pour que le monde croie que tu m'as envoyé. Et moi, je leur ai donné la gloire que tu m'as donnée, pour qu'ils soient un comme nous sommes un : moi en eux, et toi en moi. Que leur unité soit parfaite ; ainsi, le monde saura que tu m'as envoyé, et que tu les as aimés comme tu m'as aimé». Jean 17, 21-23. Voilà ce que c’est être justifié.

 

Cette unité avec le Christ n’est nullement une fusion où notre personnalité disparaitrait. Tout au contraire cette union nous permet de mieux découvrir qui nous sommes dans la présence du ressuscité, de découvrir à quoi nous sommes appelés comme aussi de mieux découvrir qui est Dieu pour nous.

 

On peut tout à fait rapprocher le mot «juste» du mot «saint. Mais si nous sommes justifiés comme le publicain chaque fois que nous nous situons en vérité devant Dieu, cet ajustement à Dieu, cette union, cette sainteté est tout un chemin qui ne sera achevé qu’au moment de notre mort.

 

Alors, tenons-nous comme des pauvres ce matin, comme des mendiants, mais des mendiants déjà relevés par l’amour infini de notre Dieu.

 

Je souhaite que nous nous tenions ce matin en vérité devant Dieu, chacun avec ce qu’il est, son histoire, ses joies, ses peines, sa générosité et son péché.

 

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