lundi 4 novembre 2013

L'invasion de l'Égypte par l’Italie


L'invasion de l'Égypte par l’Italie

Le 10 juin 1940, Mussolini tint un discours annonçant l'entrée en guerre de l'Italie sur la piazza Venezzia, à Rome, devant son peuple. L'Italie commettait ainsi une lourde erreur car elle n'était pas prête. En effet, avant même le discours du Duce, le maréchal Badoglio avait déclaré au Conseil des ministres que l'armée italienne ne disposait que d'une vingtaine de divisions préparées à 70% et d'une autre vingtaine à 50%. Au niveau de l'équipement, sa situation était catastrophique. Elle n'avait pas assez de chemises pour tous ses soldats. Presque tous les grands chefs militaires étaient opposés à son entrée en guerre. Mais, Mussolini ne tenait pas à annuler son projet qui consistait à reconstituer un Empire romain en prenant contrôle de la Méditerranée. En juin 1940, tandis que la France et l'Angleterre se trouvaient dans une mauvaise posture face à l'Allemagne, il décida de s'emparer de l'Égypte depuis la Libye.

La Libye était occupée par les Italiens depuis 1911. C'était le seul pays, avec l'Égypte, où le Sahara était en contact direct avec la mer. Son vaste territoire était constitué de deux zones habitées : la Tripolitaine et la Cyrénaïque avec, entre les deux, une zone désertique appelée la Grande Syrte. Les Italiens avaient bâti en Libye des villes ainsi que des réseaux routiers dont la fameuse via Balbia, longue de plusieurs centaines de kilomètres. Le maréchal Balbo, gouverneur général et commandant supérieur en Afrique septentrional, disposait au moment de la déclaration de guerre de 9 divisions métropolitaines de l'armée d'active, 3 divisions de chemises noires, 2 divisions libyennes et de nombreuses autres unités gardes-frontières. Au total, 250 000 hommes réunis dans deux armées : la Xe Armée, basée en Cyrénaïque, et la Ve Armée, en Tripolitaine. Toutefois, Balbo déclarait qu'il lui faudrait trois fois plus d'hommes et de matériels pour combattre les Britanniques. À cette époque, l'armée italienne présente en Afrique du Nord devait faire face à de nombreuses difficultés. Son équipement était insuffisant, périmé et défectueux. De plus, le gouvernement avait cherché à amener le confort à ses soldats au lieu de les aguerrir à la guerre du désert.

En face, le général Wavell, commandant les troupes britanniques du Moyen-Orient, avait sous ses ordres 86 000 hommes dont 36 000 en Égypte. Ces hommes constituaient la 7e division blindée du général O' Moore Creagh, la 4e division indienne du général Noel Beresford-Peirse, la 2e division néo-zélandaise du général Bernard Freyberg, 14 bataillons d'infanterie et 2 régiments d'artillerie. Ils manquaient de matériels, de munitions, de moyens de transport, de véhicules blindés et d'artillerie mais la plupart étaient des soldats de métier de bonne qualité. Durant les neuf premiers mois de la guerre, les forces du général Wavell restèrent "spectatrices". Wavell se contenta de soumettre ses hommes à un entrainement intensif. Avec l'aide du général sir Balfour Hutchison, il fit de l'Égypte une base pouvant assurer les besoins logistiques d'une armée de 300 000 hommes. Trois jours avant l'entrée en guerre de l'Italie, le général Richard O'Connor, commandant les forces britanniques en Palestine du sud, se vit attribuer le commandement de la Western Desert Force (Force du désert occidental), installée en Égypte, avec pour mission de protéger le territoire contre toute attaque ennemie. À la veille de la bataille d'Afrique, la Western Desert Force était constituée de la 7e division blindée, d'un groupe de soutien regroupant deux régiments d'artillerie tractée et de deux bataillons motorisés.

Dans la nuit du 10 au 11 juin, les Britanniques s'attaquèrent aux postes-frontières. Ils attendaient la nuit pour se déplacer discrètement dans le désert et attaquer. Le 11 juin, à 3h du matin, ils prirent d'assaut le fort Capuzzo, à la frontière entre l'Égypte et la Libye. Surprise, la garnison du fort fut faite prisonnière. Ces hommes figurent parmi les premiers prisonniers de la guerre du désert. Les premiers combats en Afrique du Nord se déroulèrent ainsi en escarmouches limitées. Le 28 juin 1940, un drame allait se produire. À 17h30, alors que le maréchal Balbo retournait d'un vol de reconnaissance sur Tobrouk, son appareil fut abattu par la DCA du San Giorgio. Les Anglais parachuteront sur le camp italien un billet au nom de l'armée anglaise :
« Les forces britanniques expriment leurs plus sincères regrets pour la mort du Maréchal de l'Air Italo Balbo, un grand condottiere et un valeureux aviateur que je connaissais personnellement et que le destin a mis dans le camp adverse...
Air Officer-Commander-in-Chief British Royal Air Force... Sir Arthur Laymore. »
Durant son vol, le maréchal avait reçu un message dont il ne put prendre connaissance. Dans ce dernier lui était donné l'ordre de lancer une offensive vers Alexandrie pour le 15 juillet, au plus tard. Le poste de gouverneur général et de commandant en chef des troupes d'Afrique du Nord était désormais libre. Le maréchal Graziani fut envoyé pour le remplacer tout en conservant ses fonctions au sein de l'état-major. Il arriva à Cirène le 30 juin et examina d'un oeil critique les dispositions prises pour la grande offensive de juillet. Il constata que le regroupement des troupes était trop lent à cause du manque de véhicules de transport. À cette époque, 30 000 camions étaient stationnés en Italie du Nord pour une éventuelle campagne en Yougoslavie. Graziani se trouvait ainsi dans une position difficile car ce n'était pas avec les camions dont il disposait qu'il pouvait assurer le ravitaillement et le transport des troupes jusqu'à Alexandrie. Le maréchal italien fera finalement reporter l'offensive au mois d'octobre.

Du côté anglais, l'inquiétude régnait car on se demandait si l'armée d'Afrique était prête à faire face aux Italiens. Si la marine et la Royal Air Force étaient à peu près prêtes, l'armée de terre n'était pas encore au point. Les Italiens jouaient gros car s'ils réussissaient leur plan, ils pourraient envisager de s'emparer du pétrole d'Iran et d'Irak. Le général Wavell fut convoqué par Churchill. Après une longue entrevue, Churchill décida de fortifier les abords d'Alexandrie et de transformer Marsa-Matrouh en un fort îlot de résistance capable de gêner les mouvements de l'ennemi. Il fut également décidé d'envoyer immédiatement en Égypte un bataillon de 52 chars lourds, un régiment de 52 chars légers, un bataillon de 50 chars d'infanterie, 48 canons antichars, 20 canons légers anti-aériens et 48 canons de campagnes.

Le 9 septembre 1940, les Italiens attaquèrent. Le plan italien prévoyait que :
- Deux divisions d'infanterie libyenne devraient attaquer Sollum et Halfaya, positions stratégiques importantes.
- Deux autres divisions d'infanterie, formant le 23e Corps, aux ordres du général Bergonzoli, devraient avancer vers Buq-Buq et Sidi Barani.
- Tandis que ces deux groupes progresseraient, un groupe blindé, dirigé par le général Maletti, opérerait un mouvement tournant sur Gabr-Salek, Sidi-Omar et Gabr bu Farès. Il devrait ainsi faire une incursion profonde dans le désert et assurer la protection du flanc droit des divisions d'infanterie.
Bombardées par la RAF et pilonnées par l'artillerie, les troupes italiennes progressèrent péniblement. Devant eux, les troupes du général O'Connor se replièrent sur une ligne de défense établie à Marsa-Matrouh. Le 13, les Italiens atteignirent Solloum, important pour ses points d'eau, et Halfaya. Le 15 septembre, ils s'emparèrent de Buq-Buq, puis, le 16, de Sidi Barrani après une avance de 100 km. C'est alors que Graziani donna l'ordre à ses troupes de s'arrêter et de consolider ses positions car ses hommes et son matériel étaient fatigués. Il ordonna aussi que l'on construise un aqueduc permettant de satisfaire les besoins de son armée en eau. Mussolini exigea que l'offensive reprenne au plus tard le 15 octobre 1940. Mais Graziani qui constatait la lenteur des travaux reporta cette date au 15 décembre.

Josué Matthieu

 

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